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ITINERAIRE DANS LA FOI AVEC LE TRAIN JAUNE

Soyez tous et toutes les bienvenus : telle est notre profession de foi.

Qui que vous soyez, croyants, non croyants, interrogatifs, convaincus ou indifférents des questions de foi, sentez-vous comme chez vous, chez nous.

Notre objectif est de vous accueillir et de vous porter une attention particulière à ce que vous êtes… tels que vous êtes.

Si vous êtes pèlerin malade ou handicapé, vous ferez partie des privilégiés. C’est à vous que se porte principalement notre attention : vous permettre d’expérimenter la fraternité et l’amitié que nous désirons vous apporter.

Si vous souhaitez donner un peu de votre temps, nous serons heureux de vous compter parmi les « B.H. » (Brancardiers-Hospitalières). Nous vous proposerons différentes activités à Lourdes ou dans notre région du Nord :

- accompagner les personnes malades et handicapées qui souffrent dans leur corps, dans leur âme et qui ont besoin de présence, de chaleur, d'espérance et de réconfort,

- visiter des personnes souffrantes ou handicapées à leur domicile ou en maison médicalisée ou de retraite,

- organiser des rencontres entre BH et malades ou entre BH dans l'année à l'initiative des responsables de salles,

- distribuer les différents courriers aux BH et aux malades,

- préparer le pèlerinage durant le premier semestre de l'année,

- rechercher des ressources financières par des demandes de dons permettant d'aider ceux qui sont en difficulté financière.

Si vous n’êtes ni malade, ni « brancardier-hospitalière », nous vous proposerons de rencontrer ceux et celles qui ont le même désir que vous, afin de vivre au mieux notre démarche annuelle de Juin, ainsi que de participer aux différentes rencontres pendant l’année : notamment les retrouvailles de Septembre à Bouvines, la fête de Noël, l’assemblée générale de notre association.

Les jeunes ont également leur place. Chaque année, des lycéens en classe de seconde nous accompagnent. C’est toujours pour eux une expérience forte dont ils se souviennent toute leur vie. Accompagnés par un prêtre et par des animateurs, ils découvrent la joie de croire et de mettre cela au service de ceux qui en ont le plus besoin.

C’est en vivant cela que nous témoignons en actes de la foi qui nous anime.

L’Evangile, nous l’annonçons également de manière explicite :
Parmi les « B.H. » nous avons la joie de compter des « animateurs spirituels ».
Notre premier objectif est de favoriser le climat de fraternité et d’amitié. C’est ainsi que nous témoignons de ce Dieu qui, en Jésus-Christ, est venu rejoindre l’humanité.
Avec les autres trains du diocèse, nous préparons les liturgies du pèlerinage de juin.
Nous aidons à ce que la prière soit l’occasion de s’exprimer, soit à haute voix, soit dans l’intimité du cœur de chacun. Ainsi nous nous mettons à l’écoute de ce que Dieu veut nous dire. Car c’est l’accueil de l’Esprit Saint en nous qui fonde notre agir fraternel.
C’est ensemble que nous vivons notre foi. Nous célébrons. Nous annonçons la Parole de Dieu. Nous vivons en frères et sœur d’un Dieu Père, Fils et Saint-Esprit.
L’écoute « active » est aussi notre objectif : que chacun puisse être reconnu dans ce qu’il est et ce qu’il fait.

C’est en essayant de vivre cela que nous accueillons l’Esprit des Béatitudes.
Bienheureux êtes-vous !

Aumônerie du Train Jaune


LE NOTRE PERE A PARTIR DE LA LANGUE DE JESUS

Il est des livres qui sont des bouffées d’oxygène. Ainsi, celui de Pierre Trigano, philosophe et analyste jungien, qui relit « le Notre Père, manifeste révolutionnaire de Jésus l’hébreu » (Réel Editions, 2008). La rétroversion de la prière dominicale du grec à l’hébreu nous permet d’en redécouvrir le souffle divin qui, toujours, bouscule nos tranquillités pour nous rendre artisan d’un Royaume différent.

L’hébreu est une langue consonantique qui permet de lire de manière plurielle un même mot si l’on en change les voyelles qui, dans la Bible ne sont pas fixées ; Le seul mot non vocalisé de la Bible est le Nom de Dieu, YHWH, qui pour cela ne se prononce pas. Certains ont rajouté « a » et « e » pour lire YaHWeH, d’autres « e », « o » et « a » et lisent YéHoWaH. Ce sont des rabbins (du Ve au IXe siècle qui ont vocalisé le texte pour faciliter la lecture de la langue hébraïque qui n’était plus guère parlée). Mais cette particularité donne surtout aux mots une multiplicité de sens puisque les voyelles ne sont que des interprétations : le mot ab par exemple, « père », peut aussi se lire eb, qui signifie « jeune pousse (végétale) ». En effet, « le Père divin, que le Christ nous présente tout au long de son enseignement hébraïque, révèle une fonction paternelle fondée sur l’amour qui se fait la cause des « jeunes pousses », de la différenciation humaine. Le Christ nous appelle à nous affranchir de l’ordre figé des despotismes religieux pour rencontrer la loi divine non comme une loi sadique qui retient l’enfant par la culpabilité, emprisonne l’être nouveau dans l’ancien, mais au contraire comme une loi d’amour qui protège et légitime la force renouvelante et révolutionnaire des ‘jeunes pousses’ » ! (p 20) La liberté de l’écriture révélée et de sa lecture rejoint la psychanalyse : le père, en posant « la loi qui interdit l’inceste et le retour à la matrice d’origine », ouvre l’être nouveau à son avenir en lui barrant la route de « la répétition des points de vue, identités, modes de vies des générations passées ». Le Dieu de Jésus est « amour, puissance de vie intarissable (la ‘verdure’). Il est la pulsion divine de la vie qui est toujours le désir, en nous, de favoriser l’avènement de ‘jeunes pousses’, c’est-à-dire le renouvellement incessant de la psychè humaine. C’est un Dieu ouverture qui combat en nous les idoles de pouvoir de tous les despotismes et intégrismes de toutes sortes, religieux, psychologiques, culturels, sociaux, politiques. Le mouvement de Jésus lui-même émerge il y a deux mille ans comme une telle ‘jeune pousse’, renouvellement radical de l’expérience humaine, tant vis-à-vis de l’identité biblique de l’Israël traditionnel que vis-à-vis du monde généré par l’empire romain. Une jeune pousse dont la seule légitimité est ce Père divin d’amour, présent en chacun de nous » (p 21). Ce qui instaure une fraternité comme le suggère le mot même de « notre père » (abinou) qui contient le « en moi » (bi) dans le « nous » (anou) : « lorsque je proclame le Notre Père, je proclame l’éthique d’une libre communauté humaine fondée en Dieu, dans laquelle le ‘nous’ n’annule pas le ‘je’, pas plus que le ‘je’ n’annule le ‘nous’ » (p 24).

Le pronom « qui » (asher) signifie aussi le bonheur, ce qui donne : « Notre Père, bonheur dans les cieux ». Il faut ajouter que, « dans la symbolique biblique, les cieux ne désignent pas une réalité physique mais le monde de l’esprit (… qui) transcende (dépasse) le conscient des hommes. Il se manifeste de l’intérieur d’eux, dans les rêves par exemple, et il symbolise (…) l’inconscient ». Pour Jung, le « Soi » est « la présence divine inconsciente en l’homme, pulsion de vie au cœur de la psychè humaine. La prière de Jésus nous dit ainsi que cette pulsion de vie, Notre Père qui fonde les jeunes pousses, est la source du bonheur en nos vies » (p 27). C’est dans nos « cieux intérieurs » que sourdent les eaux du bonheur ! La terre, quant à elle, « pourrait être le symbole du conscient dans l’être humain où règne le moi » (p 45).

Ainsi, le ciel rejoint-il la terre dans la sanctification du nom de Dieu qui peut, en hébreu, être lu non comme un souhait mais comme un futur dont la foi est certaine. « Ton nom » (shimkha) peut s’entendre avec une autre vocalisation : « celui qui est descendu, qui est devenu pauvre » (shé moukh). « Et effectivement, Dieu qui est l’infini, accepte pour ainsi dire de se faire ‘pauvre’, par amour pour les jeunes pousses que nous sommes chacun, en s’incarnant comme présence dans les limites de chaque vie individuelle, lui qui est le sans limite, pour qu’en chaque individu, l’œuvre de l’humanité se renouvelle sans cesse (…) Certes, la version la plus courante et la plus superficielle de la théologie chrétienne semble faire de l’incarnation de Dieu un privilège d’exception qui concerne exclusivement Jésus. Ce faisant, elle projette celui-ci en dehors de la condition humaine, bien qu’elle affirme abstraitement le contraire, et elle en fait un Dieu lointain, frôlant de ce fait l’idolâtrie (…) Le fidèle préformé par une telle théologie aura toujours tendance à considéré Jésus comme une sorte de dieu extérieur à lui, tellement étranger et toujours supérieur à lui, craignant toujours d’être indigne de lui. Il l’approchera toujours dans un état de culpabilité et d’insécurité, se rassurant par des prières codifiées et ritualisées, en dehors de toute spontanéité. Alors que le Jésus de l’Evangile s’est présenté à nous comme un frère humain, nous apportant la bonne nouvelle de l’amour inconditionnel de Dieu (…) Il est venu nous révéler ainsi que le ‘nom’ est en réalité le nom, la présence, de Dieu Notre Père qui, par amour pour nous, ‘descend’, s’incarne par le canal de nos vies personnelles. Dès lors, poursuit Pierre Trigano, nous sommes appelés à travers lui à prendre conscience que la vie qui coule en chacun de nous est divine, devant être célébrée et respectée en tant que telle, en tous et par tous. C’est cela sanctifier le nom de Dieu : cela n’a rien à voir avec une célébration religieuse formelle. C’est une affirmation éthique au sein de l’humanité. Nous sommes appelés à reconnaître en la vie de chacun la présence divine, et à nous laisser interpeler par elle. Elle nous appelle personnellement de l’intérieur de chacun de nous. Elle désire nous réunir (…) L’œuvre essentielle de Jésus n’est rien d’autre que cette réconciliation qu’il a appelé l’amour ». C’est à cette œuvre qu’Il nous associe « en prophétisant que nous irons encore plus loin que Lui » (p 34-38. Cf. Jn 14, 12) ! Pour soutenir cette version, l’auteur précise que « comme au ciel » (kevashemayim) se compose de deux mots, « kevesh » (agneau) et « maïm » (eaux). « Ken » (ainsi, comme) peut se dire « fondé » : « ta volonté, ta joie sera faite : l’agneau des eaux fondé sur la terre (…) Tout se passe comme si depuis Abraham et la fondation de ce peuple, le messie évoluait dans les eaux matricielles où son possible est encore caché. Il est encore l’agneau des eaux. Cependant Jésus se lève et proclame : l’agneau des eaux est enfin fondé sur la Terre ! Il est né à travers sa personne, et dès lors, la joie, la volonté de Dieu Notre Père sera faite, car le Royaume de Dieu commence à se réaliser sous son impulsion » (p 46) !

N’est-ce pas à ce combat christique que nous nous engageons en priant : « ton règne viendra, ton royaume s’accomplira » ? Là encore, l’hébreu nous invite à un futur assuré autant qu’assumé plutôt qu’à un vœu pieu ! Et c’est dans l’aujourd’hui qu’il nous convient de le vivre tel que Matthieu le résumera selon un principe opposé à celui de l’organisation du monde : « il n’en sera pas de même parmi vous. Mais quiconque veut être grand parmi vous, sera votre serviteur, et quiconque veut être le premier parmi vous sera votre esclave » (20, 25-27. p 41)… pour que la volonté de Dieu soit une réalité sur la terre comme aux cieux. Pourtant, il ne s’agit pas de s’astreindre à un devoir mais de participer à la joie de Dieu selon le double sens de ratson : volonté et plaisir (p 45) ! Les béatitudes le disaient déjà qui promettaient que ceux et celles qui ont faim et soif de justice seraient rassasiés. C’est ce pain de Dieu que nous demandons, notre pain du « lendemain », c’est-à-dire du royaume qui vient : que, dès aujourd’hui, « nous puissions nous nourrir de ce ‘futur-là’, du royaume de Dieu et de son éthique » et nous laisser restaurer par lui : prenant des forces, nous sommes transformés et devenons acteurs de ce monde nouveau : le pain (leh’em) et aussi le combat (lah’em) (p 52-57). A la suite du Christ ! « Il est dommage, poursuit notre auteur, que dans l’histoire du christianisme, l’eucharistie soit devenue une sorte d’acte magique abstrait, - la transsubstantiation du pain et du vin, en corps et sang du Christ – qui n’a que peu de choses à voir avec cet engagement conscient et quotidien dans le combat de la vie. Dans les églises assoupies et embourgeoisées gouvernées par la pensée grecque, Jésus n’est plus connu comme le combat messianique. Les catholiques croient intégrer son corps sacrifié dans l’eucharistie, et les protestants croient intégrer symboliquement ce sacrifice par la sainte cène. Mais dans tous les cas, il s’agit d’un corps ‘abstrait’, qui n’a plus rien à voir avec l’incarnation humaine vivante. On se nourrit d’une abstraction métaphysique, mais non du combat messianique réel de Jésus pour le royaume. Or le vrai corps et sang du Christ, c’est son combat de vie. Et c’est ce combat qu’il nous demande d’intérioriser. Seul l’engagement dans ce combat peut nous faire accéder à la vie éternelle et nous guérir » (p 62)

Rien d’éthéré donc dans cette prière du Notre Père comme le souligne les deux dernières demandes. En grec déjà, il est question pour Matthieu de la remise des dettes et non seulement des offenses : il s’agit donc d’abord d’une « catégorie économique, ayant même des incidences sociales et politiques très lourdes dans le contexte historique où vit Jésus » tout comme dans le nôtre, dominé par un « système financier qui impose sa loi à l’ensemble de l’humanité de manière unilatérale en plaçant l’objectif de la rentabilité financière avant les besoins humains, l’argent avant l’être humain » (p 64-65). Or nous prions Dieu de nous enlever nos dettes parce que nous les enlevons à ceux qui nous doivent ! Autrement dit : « Notre Père, mène en nous le combat spirituel qui nous détache de l’Esprit de l’économie, parce que nous nous engageons à ne pas utiliser le pouvoir créancier que nous avons sur des êtres humains pour les dominer (…) Nous désirons substituer à l’esprit de l’Economie l’esprit d’entraide, mais à cette fin, nous avons besoin de ton combat en nous pour que nous osions nous détacher de la logique économique qui nous possède, nous rend serviles et apeurés ».

Mais l’hébreu nous invite à aller plus loin. Si néshim signifie « dettes », nashim veut dire « femmes » (p 71). « Or, bizarrerie étonnante de la langue hébraïque, il est important de noter que ce mot est un masculin pluriel », symptôme pour notre auteur que, « au niveau de l’histoire collective de l’histoire, le lieu du féminin, de l’ouverture, est massivement défiguré en attitude masculine crispée et paranoïaque d’affirmation. C’est cette état de déni du féminin qui fait, pour la Bible hébraïque, et donc pour Jésus, l’aliénation de l’humanité, son incapacité à laisser transparaître la présence divine d’amour qui constitue pourtant son être. D’où la difficulté à nous ouvrir à un esprit authentiquement communautaire d’entraide, la difficulté corrélative à sortir de l’esclavage individualiste de l’Economie ». Pierre Trigano arrive donc à cette traduction : « enlève en nous le déni du féminin qui nous affecte parce que nous l’enlevons aussi en ceux qui nous doivent (qui dépendent de nous) » (p 71-73). Une intuition qui mérite sans doute d’être approfondie d’autant que l’épreuve à laquelle nous demandons à Dieu de ne pas nous soumettre peut être lue à lumière de l’endurcissement du cœur de pharaon « pour pouvoir créer la situation de crise majeure qui le contraindra à libérer les esclaves hébreux (…) Comprenons que c’est le déni du féminin, le déni de l’amour et de l’ouverture à l’autre, qui attire l’épreuve » (p 78). Précisons que le grec lui-même ne parle pas de tentation. Dieu ne tente pas mais nous éprouve comme le peuple au désert pour nous faire avancer, pour nous ouvrir à sa présence en nous délivrant du mal qui nous tente. Pas besoin d’épreuve si nous partageons le combat de Jésus !

De quoi relire la prière dominicale et vivre autrement le Pèlerinage de Juin : ce sont deux femmes qui nous guident pour une petite semaine différente qui transfigure toute notre année.